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Le jardin des morts et ses adorables squelettes

Après n’avoir pas pu poster ici depuis très longtemps, j’ai décidé de faire mon retour avec de l’insolite (on ne se refait pas). Je suis un peu en retard sur Halloween mais vous me pardonnerez… n’est-ce pas ? En tout cas, aujourd’hui, je vous emmène en excursion dans… le jardin des Morts !

Hugo Simberg, Le Jardin de la mort (en finnois : Kuoleman puutarha), gouache, 15,8 x 17,5 cm, 1896, Musée d'art Ateneum, Helsinki, Finlande.
Hugo Simberg, Le Jardin de la mort (en finnois : Kuoleman puutarha), gouache, 15,8 x 17,5 cm, 1896, Musée d’art Ateneum, Helsinki, Finlande.
Excursion dans le jardin des Morts
Hugo Simberg et sa soeur, photo prise par lui-même en 1896. Finnish National Gallery, Helsinki.
Hugo Simberg et sa soeur, photo prise par lui-même en 1896. Finnish National Gallery, Helsinki.

Hugo Simberg est un artiste Finlandais de la fin du XIXème/début du XXème siècle (1873-1917). Déjà, ça sort de l’ordinaire ! Je ne vous parle pas souvent d’artiste Finlandais. Ensuite, parce que si vous avez jeté un coup d’œil à l’œuvre dont j’ai décidé de vous parler (voir ci-dessus), Le jardin de la mort (1896), vous vous êtes peut-être fait la même remarque que moi : « Mais, ça date de la fin du XIXème, ça ?! » (j’espère que vous avez prononcé cette question à voix haute en prenant l’expression du Cri de Munch… qui était Norvégien, pas Finlandais, ça n’a donc aucun rapport).

Ce squelette n'est-il pas adorable ?
Ce squelette n’est-il pas adorable ?

En effet, si j’ai choisi de vous parler de cette peinture, c’est parce qu’elle m’a sauté aux yeux quand je l’ai découverte. Premièrement parce qu’il n’est pas commun de voir la mort représentée de cette manière : des sympathiques squelettes semblant sourire et s’adonner au jardinage. Deuxièmement, parce que cette peinture m’a semblé très moderne (j’ai cru qu’elle était beaucoup plus récente que ça) et, dans le même temps, m’a rappelé des enluminures du Moyen-Age. Avec ses couleurs et son apparente naïveté, sa simplicité, elle semble sorti d’un autre temps. Et j’adore les œuvres aussi anachroniques !

« Hugo Simberg, symboliste obsédé par la mort et le fantastique, n’a pas laissé une oeuvre abondante, mais ses aquarelles, où des démons étranges personnifient les forces de la nature, sont fascinantes. »

[Source : Georges Desneiges, Finlande, Paris, Seuil, 1960, n.p.]

Des squelettes anachroniques ?

Mon étonnement ne s’est cependant pas arrêté là. Cette œuvre m’a surtout surprise parce qu’elle m’en a rappelé une autre, bien plus récente et bien différente : elle m’a immédiatement fait penser à (tenez-vous bien) un manga que je lis depuis un petit moment : Colette décide de mourir (« Colette decides to die« , en anglais, car il n’est pas encore sorti en France, ou « Colette wa Shinu Koto ni Shita » pour ceux qui voudraient le titre japonais). C’est un peu fou, non ? Personnellement, j’ai trouvé ça un peu fou. Et encore plus anachronique (j’adore les oeuvres anachroniques et le mot « anachronique » qui, d’ailleurs, est un « chrononyme », voilà, c’était une info supplémentaire, comme ça, c’est pour moi, c’est cadeau).

Colette Decides to Die (コレットは死ぬことにした) de Yukimura Alto, publié depuis 2013, Japon.
Colette Decides to Die (コレットは死ぬことにした) de Yukimura Alto, publié depuis 2013, Japon.

Ce manga de Yukimura Alto, dont la publication a commencé en 2013 au Japon, raconte l’histoire (tenez-vous bien, encore) de Colette qui décide de mourir (je vous avais prévenus). Pour ce faire, elle décide de se jeter dans un puits. Puits qui s’avère être un passage vers les Enfers.

C’est là qu’elle va faire la rencontre du dieu Hadès (et oui, la mythologie grecque, d’un coup, BAM, vous ne l’aviez pas vue venir celle-ci, hein ?) et de son équipe de gestion du monde des Morts : des squelettes absolument A-DO-RA-BLES. Je vous laisse en juger par vous-mêmes (je ne posterai pas beaucoup d’images car je ne voudrais pas trop vous spoiler) :

En plus de ces squelettes, qui se vouent corps et âme (façon de parler, ahah) à Hadès, le manga met en scène à peu près tous les personnages qui entourent ce dieu dans sa mythologie d’origine : Cerbère (adorable lui aussi !), Charon, le passeur des Enfers, ainsi que d’autres divinités grecs. Se mêlent aussi à cette joyeuse bande des personnages typiquement japonais. Dont Colette, dont on ignore finalement beaucoup de choses, hormis le fait qu’elle est médecin et souhaite, dans un premier temps, mourir.

Squelettes adorables et jardinage dans le monde des Morts

Colette Decides to Die (コレットは死ぬことにした) de Yukimura Alto, publié depuis 2013, Japon.
Colette Decides to Die (コレットは死ぬことにした) de Yukimura Alto, publié depuis 2013, Japon.

Outre la curieuse ressemblance entre les squelettes de ce manga et ceux de la peinture de Simberg, c’est aussi le thème du jardin qui a retenu mon attention. En effet, sans trop vous en dévoiler, tout un arc narratif du manga parle du fait qu’il est impossible de faire pousser quelque chose dans le monde des Morts. Une façon de dire qu’il est impossible de vivre dans cet endroit. Ce que le personnage de Colette va s’évertuer à combattre tant elle va s’attacher à celles et ceux qui font bel et bien vivre les Enfers.

On peut voir en cela toute une symbolique sur l’importance du souvenir mais aussi sur la résilience face à la perte. Il s’agit de maintenir le cycle de la vie, par-delà la mort : conserver la mémoire de ceux qui ne sont plus là mais continuer à avancer car ils l’auraient souhaité ou que d’autres le souhaiteront un jour. Celles et ceux qui ont vu le film d’animation Coco verront sans doute de quoi je veux parler car on y trouve une façon de percevoir la mort assez similaire, par moments. Ces œuvres nous encouragent à penser la mort non pas comme une fin en soi mais une autre forme d’existence, possible grâce à notre faculté à nous rappeler nos défunts et à entretenir leur souvenir.

Le squelette de Frida Kahlo dans le film d'animation Coco (2017)
Le squelette de Frida Kahlo dans le film d’animation Coco (2017)

Il semble en tout cas que le thème du Jardin des Morts était cher à Hugo Simberg car il en a réalisé plusieurs versions, avec différentes techniques. Vous pourrez en trouver quelques unes dans la galerie, à la fin de cet article.

Bref, Colette decides to die est un de mes mangas préférés depuis un petit moment. Je l’ai justement découvert peu de temps après avoir perdu ma maman et, contrairement à ce qu’on pourrait croire, je ne le regrette pas. Il est très positif contrairement à ce que son propos pourrait laisser croire de prime abord. Je trouve qu’il a une façon originale de « dédramatiser » des sujets très durs (la mort, le suicide, l’abandon, la perte, la maladie… tellement de choses). Et puis, on y suit une jolie histoire d’amour (impossible ? On ne sait pas encore, le manga n’est pas encore terminé mais je crois en une happy ending parce que je suis une indécrottable romantique).

Hadès et deux de ses squelettes serviteurs du manga Colette Decides to Die (コレットは死ぬことにした) de Yukimura Alto, publié depuis 2013, Japon.
Hadès et deux de ses squelettes serviteurs du manga Colette Decides to Die (コレットは死ぬことにした) de Yukimura Alto, publié depuis 2013, Japon.

Je ne peux que vous en conseiller la lecture (bon, il faudra lire l’anglais ou le japonais) si vous avez l’occasion de vous le procurer.

Galerie d’œuvres d’Hugo Simberg

Quant à notre artiste Finlandais, Hugo Simberg, je vous propose de découvrir quelques unes de ces autres œuvres ci-dessous. Je pense que, comme moi, vous en conclurez qu’il mérite d’être plus connu !

J’espère que vous ne le trouverez pas trop macabre. En ce qui me concerne, je trouve ses œuvres vraiment surprenantes. C’est pour cette raison que j’ai choisi de vous les faire découvrir. Il faut savoir qu’Hugo Simberg a notamment illustré des contes et a été un artiste Symboliste toute sa carrière (même quand ce mouvement n’était plus trop « à la mode »). Ceux qui suivent un peu les articles de ce blog savent à quel point j’adore ce genre de profil ! On peut donc s’amuser à trouver les histoires derrière ses œuvres et essayer d’y déceler tous les niveaux de lecture possibles. Mais comme le disait l’artiste lui-même :

« Il incitait les gens à faire leurs propres interprétations et il espérait que ses peintures touchent au plus profond et fassent pleurer les gens en leur for intérieur. A son avis on ne devait pas réfléchir à ce que le peintre avait pensé quand il a fait son œuvre ou ce qui se passe dans la peinture : le plus important, c’est la sensation du spectateur. »

[Source]

N’hésitez pas à me dire en commentaire laquelle de ses œuvres est votre préférée ! Et dites-moi si elles vous ont touché, comme l’espérait l’artiste.


Sources :

Wikipédia, Hugo Simberg
Google Arts and Culture – The Garden of Death

Nounours des Gobelins : invasion d’ours en peluche à Paris !?

Nos villes, nos magasins et peut-être déjà nos maisons se parent peu à peu des premières décorations de Noël : pas de doute, le mois de décembre approche. Mais en attendant, la grisaille est là, il fait froid, nous sommes tous un peu fatigués et bougons. J’ai donc décidé de vous parler d’une initiative qui devrait vous donner le sourire, aujourd’hui : les Nounours des Gobelins. Car on en a bien besoin !

Nounours des Gobelins : des Nounours géants et trop mignons ont envahi le quartier des Gobelins, non loin de la Place d'Italie, à Paris.
Nounours des Gobelins : des Nounours géants et trop mignons ont envahi le quartier des Gobelins, non loin de la Place d’Italie, à Paris.

Des Nounours géants dans Paris !?

Ils mesurent 1m40, pèsent environ 5kg, couleur vanille et ont des bouilles qui ne pourront vous empêcher de vous extasier en mode : « Ils sont crôôôôô mignons ! » Ce sont les Nounours des Gobelins.
On les surnomme ainsi parce qu’ils ont envahi le quartier des Gobelins (XIIIème arrondissement) à Paris, depuis fin octobre. On les trouve tantôt en terrasse d’un restaurant, dans un café, tantôt dans le métro, ou encore à la pharmacie, chez le caviste, le fleuriste ou le coiffeur du quartier. Les mises-en-scènes sont nombreuses et changent régulièrement. L’autre jour, ce sont même jusqu’à 37 ours qui apparaissent aux fenêtres de l’Hôtel des Gobelins !

Mais qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? POURQUOI ???

D’où viennent les Nounours des Gobelins ?

« Qui est à l’origine de cette moelleuse invasion ? « La confrérie des francs-oursons », ironise un barman de la rue interrogé par BFMTV. »

Source : Ouest-France – « Paris. Des nounours géants envahissent le quartier des Gobelins »

Ce serait marrant mais, évidemment… non. Apparemment, c’est le libraire du 25 avenue des Gobelins qui est à l’origine de l’apparition de ces adorables nounours, un peu partout dans le quartier. Il semble qu’il ait acheté les peluches (une cinquantaine !) et les prête aux commerçants ou aux habitants, à la demande. Les Nounours vont donc parfois chez les riverains et pas seulement dans les boutiques du quartier.

Le but ? Apporter de la bonne humeur aux gens, semble-t-il. En effet, dans Le Parisien (Source), des commerçants voisins expliquent qu’il ne s’agit pas d’une opération commerciale mais bel et bien d’une idée marrante, mignonne, pour rapprocher les gens. Pour Ouest-France, « ils n’ont rien d’autre à vendre que leur propre présence, aucun autre but que de faire sourire, retomber en enfance. » (Source)

« Certains n’ont pas saisi… A la sandwicherie bagel, la serveuse à l’accent anglo-saxon croit savoir que « c’est la mairie qui a mis ça en place pour les enfants ». Au café de la Manufacture où deux ours sont attablés en permanence, Karim, un client, croyait que « c’était pour le réchauffement climatique » tandis que Dan, son voisin, pensait « que c’était une déco de Noël ». Jérôme, le patron, est lui très clair : « C’est un délire et c’est que du bonheur », dans lequel se sont engouffrés des policiers… « Y a des flics qui sont venus en chercher deux pour les ramener au commissariat. Ils les ont baptisés Starsky et Hutch ». »

Source : Le Parisien – « Paris : l’incroyable buzz des nounours géants des Gobelins »

Galerie des Nounours

Qu’est-ce que la Mairie pense des Nounours ?

Il semble que même la maire de Paris, Anne Hidalgo, a apprécié l’initiative comme en témoigne ce tweet plein d’émoticônes nounours et de cœurs :

Il faut dire que, bon, les initiatives citoyennes ont le mérite d’être gratuites pour la Mairie qui peine parfois à rendre la Capitale plus agréable à vivre pour tous. Les raisons sont nombreuses (manque de moyens, lois, lenteurs administratives, divergences politiques…).

On peut toutefois se demander si c’est toujours à la Mairie d’une ville ou à ses institutions politiques en général, de prendre ce genre d’initiative. Celle-ci a un coût, certes (il a fallu acheter une cinquantaine de peluches géantes, ce n’est pas rien) mais quel parti les habitants du quartier, et surtout ses commerçants, tirent-ils de cette idée ? Il semble en tout cas que les ours attirent les curieux. Ce sont autant de potentiels clients à la clef. Ils rendent également les gens plus joyeux, ce qui est aussi une bonne chose pour le commerce : les gens sont plus enclins à se rendre dans les boutiques mais aussi à acheter chez elles.

Enfin, les réseaux sociaux font le reste ! Les gens partagent en grand nombre des photos des Nounours sur la toile. La page Facebook qui leur est dédiée compte, à l’heure où j’écris ces lignes, 6307 « J’aime » et 6439 abonnés. Leur compte Instagram, quant à lui, a déjà attiré 1369 fans (liens à la fin de cet article).

En fait, c’est une idée plutôt politique au sens premier du terme : en effet, les citoyens prennent ici part à la vie de la cité (« polis »).

Des nounours plutôt cools ?

Pour conclure, je trouve tout ça amusant, ludique et clairement bon enfant. Bref, j’aime beaucoup cette initiative. En fait, je crois que je l’aimerais bien même si elle était commerciale (et elle l’est, in fine, même si ce n’est pas l’objectif premier de l’instigateur).  Certains la trouveront peut-être futile, infantile, voire ridicule. Personnellement, je trouve qu’elle dynamise le quartier, fait sourire les gens, apporte un peu de bonne humeur et de fantaisie au quotidien. Elle recrée des liens entre les personnes (les habitants, les commerçants, les passants, les curieux…) et ce n’est pas si courant !

La seule question que je me pose c’est : personne n’abîme les peluches ? Personne n’essaye de les voler ? Si c’est le cas, c’est très bien et je souhaite de tout cœur que cela dure !

Et puis, ces nounours me rappellent celui que j’ai dessiné il y a quelques mois (et qu’il faudrait que je me décide à mettre en couleur, un jour) :

Vous ne trouvez pas qu’il y a un air de famille ?

En plus, grâce à cette initiative, c’est la deuxième fois sur ce blog que nous parlons d’art dans le XIIIème arrondissement de Paris. Un quartier à visiter, donc, vous ne croyez pas ?

Et vous, que pensez-vous des Nounours des Gobelins ? Bonne idée ou mauvaise idée ? N’hésitez pas à me dire si, étant à Paris, vous les avez vus en vrai ! Ou à partager d’autres initiatives citoyennes de ce style, qui égaye votre ville ou votre quartier. D’ailleurs, ne devrait-on pas faire ça plus souvent ?

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Sources :

Page Facebook – Les Nounours des Gobelins
Compte Instagram – Les Nounours des Gobelins
Le Parisien – « Paris : l’incroyable buzz des nounours géants des Gobelins »
Paris Zigzag – « Pourquoi voit-on des nounours géants partout dans le 13e ?! »
Ouest-France – « Paris. Des nounours géants envahissent le quartier des Gobelins »
Paristoric – Le Quartier des Gobelins

Inktober 2018 – Mes dessins

Pour la deuxième année consécutive, j’ai décidé de participer à l’Inktober ! Pour ceux qui ne sauraient pas de quoi il s’agit, je vous avais fait un petit topo sur le sujet dans l’article qui présentait mes dessins, l’année dernière.

Comment s’est passé l’Inktober cette année ?

Cette année, j’ai décidé de prendre mon courage à deux mains et de passer du noir et blanc à la couleur. J’ai enfin ressorti mes aquarelles et mes pinceaux, ça m’a fait beaucoup de bien. Mais, évidemment, j’ai eu beaucoup plus de mal à tenir le rythme d’un dessin par jour pendant trente et un jours.

Au final, il me manque deux dessins et certains ne sont pas colorés (c’est voulu pour le 19ème mais pas pour les autres). Mais, bon, je suis quand même très fière de moi parce que ça représente un sacré progrès par rapport à l’année dernière déjà. Et par rapport à mon état de santé et à ma confiance en moi et en mes capacités, surtout.

Je vous laisse découvrir mes dessins ci-dessous. Quant à ceux qui voudraient en savoir encore plus à leur sujet, sachez que j’ai détaillé mon travail au jour le jour sur Instagram. Vous y trouverez aussi des photographies de ces dessins en cours de réalisation, des anecdotes, leur petite histoire à chacun.

Mon Inktober 2018 :

Thèmes de l'Inktober 2018
Thèmes de l’Inktober 2018

Ces dessins vous plaisent ? Pensez aux boutiques Studinano !
Vous y trouverez des reproductions de divers formats et sous différentes formes, des vêtements, des bijoux, des accessoires et des créations originales pour faire plaisir aux grands, aux petits, à toute la famille et pour toutes les occasions !

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Inktober 2017 – Mes dessins

Cette année, pour la première fois, j’ai trouvé (pris ?) le temps de participer à l’Inktober ! Pour ceux qui me suivent sur les réseaux sociaux, ça n’est pas une grande nouvelle : vous le saviez déjà car j’ai posté régulièrement mes dessins sur Instagram, Twitter et Facebook. Pour les autres, voici mes 31 (un peu plus en fait ;D) dessins regroupés ici.

Inktober, c’est quoi ?

L’Inktober existe depuis 2009. C’est l’artiste américain Jake Parker qui l’a créé pour améliorer ses propres compétences de dessinateur, à la base. Et, de fil en aiguille, de plus en plus de gens ont décidé de participer.

L’Inktober n’est pas vraiment un concours. On ne gagne rien, on participe si on veut et on s’arrête si on le souhaite. On peut choisir de suivre les thèmes de l’année (disponibles sur la page officielle de l’Inktober ou sur les réseaux sociaux, et que je vous mets aussi ci-dessous) ou créer les siens si on veut travailler sur des thèmes particuliers, par exemple, ou augmenter la difficulté selon son niveau. On peut aussi choisir d’y aller en freestyle, selon l’inspiration du jour.

Normalement, le but est de dessiner à l’encre (d’où le « ink » qui signifie « encre »). Mais ça n’est pas toujours évident. Maintenant, les artistes viennent avec leurs propres techniques et leurs propres envies et c’est encore plus fun, je trouve. Ça permet de découvrir d’excellents artistes d’horizons divers, qui travaillent soit de manière traditionnelle (crayons, feutres, encre, peinture…) soit sur ordinateur. Pour ma part, j’ai opté le plus souvent pour un bon vieux crayon gris (crayon de bois ? Crayon à papier ? J’ai vu que, comme pour le pain au chocolat, les gens commencent à se battre sur la bonne façon de dire : donc POUR MOI ce sera crayon gris et petit pain, bordel).

Mon Inktober 2017 :

Thèmes "officiels" du Inktober 2017.
Thèmes « officiels » du Inktober 2017.

De l’orgue de barbarie à nos ordinateurs : une histoire de trous

Avec les évènements de ces derniers jours, j’ai envie de vous faire un peu rêver. C’est pourquoi je vous propose aujourd’hui de nous arrêter sur cette vidéo dans laquelle vous allez pouvoir redécouvrir un des classiques de Michael Jackson, Smooth Criminal, interprété… à l’orgue de barbarie.

A l’origine de cette prouesse, un certain Patrick Mathis, qui avoue sur son site web être « tombé dans le trou d’un carton d’orgue de barbarie en 1980 (…) et passe[r] tout son temps à composer ou arranger de la musique pour ses instruments et ceux des autres ! »
Bref, un mordu ! Et ça se voit. Et c’est bien. C’est même super cool.


Sommaire de l’article

L’orgue de barbarie : à la découverte des automatophones
XVIIe, XVIIIe, XIXe siècle : ces siècles qui aimaient les automates et les automatismes
L’orgue de barbarie : ancêtre des ordinateurs


L’orgue de barbarie : à la découverte des automatophones

Un orgue de barbarie.
Un orgue de barbarie.

L’orgue de barbarie est l’étrange instrument que Patrick Mathis actionne à l’aide d’une sorte de manivelle tout au long de sa vidéo. C’est un instrument qui n’est pas tout jeune puisque son apparition date du XVIIIe siècle. Mais certains indices laissent même penser qu’il pourrait avoir été inventé au moins un siècle plus tôt.

Il m’est assez difficile de vous expliquer simplement comment fonctionne cet instrument. Sachez au moins que c’est un instrument à vent. Autrement dit, grâce à la manivelle qu’il actionne, le tourneur (nom de celui qui « joue » de l’orgue de barbarie) fait entrer de l’air dans la machinerie qui compose l’instrument. Un système de soufflets permet alors aux « flûtes » (les tuyaux de l’orgue, que vous pouvez voir à l’avant de l’instrument) de recevoir ou non de l’air.  Alors, quand celles-ci s’actionnent ou non, au moment où le papier perforé laisse ou non passer l’air jusqu’à elles, les dites flûtent produisent le son et rendent la mélodie pré-programmée.

C’est pour cette raison que l’orgue de barbarie fait aussi partie des automatophones : les instruments qui jouent de la musique de façon automatique. En l’occurrence, dans le cas de l’orgue de barbarie, il « suffit » d’actionner la manivelle pour dérouler le papier perforé qui produira la mélodie. Encore faut-il posséder le dit papier ou le composer soi-même !

Toutefois, les automatophones ne sont pas tous des orgues de barbarie. Certains sont des instruments encore plus complexes. Dans la vidéo ci-dessous, vous pourrez par exemple voir un automatophone composé de plusieurs instruments, dont un piano et un violon bien visibles. Vous constaterez cependant que sur ce modèle aussi un papier perforé sert de « pré-programmation » à l’instrument.

Il existe des orgues de barbarie bien plus grands et bien plus complexes encore que celui utilisé par Patrick Mathis. On appelle ces instruments des Limonaires, du nom de la famille qui les rendit célèbres au XIXe siècle. S’ils peuvent être portatifs, ils sont tout de même beaucoup plus imposants que leurs petits frères.
Vous pouvez bien sûr observer des tas d’exemples de Limonaires, tous assez différents les uns des autres, avec leurs particularités et détails qui vous feront craquer ou non. Certains sont immenses, d’autres ne vous sembleront peut-être pas si différents des orgues de barbarie « standards » ; certains vous sembleront être de véritables objets d’art, d’autres vous apparaîtront comme des objets de foire rustiques. Toutefois, pour l’anecdote, sachez qu’il en existe un très beau à l’Abbaye de Collonges, près de Lyon, lieu de réception appartenant à nul autre que Paul Bocuse, le célébrissime Chef. Je vous propose d’en voir quelques photographies ci-dessous (chéri, si tu cherches un endroit où m’emmener dîner à l’occasion…).

XVIIe, XVIIIe, XIXe siècle : ces siècles qui aimaient les automates et les automatismes

Il n’est pas particulièrement étonnant que l’orgue de barbarie ait fait son apparition aux alentours du XVIIIe siècle car cette période est riche en développements d’automates en tout genre.

Pour comprendre, il faut voir les automates et, plus largement, les machines automatisées de cette époque comme toutes sortes d’horloges très perfectionnées. Plutôt que de donner l’heure cependant, elles effectuent mécaniquement un ensemble de mouvements prédéfinis à l’aide de complexes emboîtements de rouages. C’est aussi de cette façon que fonctionnent les orgues de barbarie et les Limonaires : grâce à des automatismes. En l’occurrence, ceux-ci permettent de jouer de la musique (il ne faut donc pas confondre un Limonaire, aussi grand soit-il et même s’il peut se composer d’automates, avec une horloge astronomique, comme celle de Strasbourg dont je vous avais déjà parlé ici, car celle-ci a pour but premier d’indiquer le passage du temps et non d’être un instrument de musique).

Or, le XVIIIe siècle est l’époque à laquelle Jacques de Vaucanson ou la fratrie Jaquet-Droz enchantent les publics avec des poupées mécaniques, des « anatomies mouvantes » (Source : Chantal Spillemaecker, Bernard Roukhomovsky (préf.), Vaucanson & l’homme artificiel : Des automates aux robots, Grenoble, Presses Universitaires, coll. « HC Histoire », 2010, p.9.) époustouflantes : des automates, ancêtres des robots.
Pour permettre à leurs créations de se mouvoir de façon particulièrement complexe, ils usent de tous les éléments propres à l’horlogerie et les mécanismes qu’ils inventent ont tout de la mystérieuse machine d’Anticythère.
Leurs prouesses sont rendues possibles par l’enrichissement de l’art de l’automatisation et, surtout, sa diversification. Rouages, mécanismes d’horlogerie et, dans le cas de notre orgue de barbarie, de drôles de feuilles perforées qui passent sous un cylindre ; les moyens d’automatisation se perfectionnent, de complexifient, se réinventent et permettent d’obtenir des résultats aussi divers que variés.

A peine un siècle plus tard, « au seuil du XIXe siècle [les automates deviennent des] objets de luxe […] au même titre que les bijoux. Ces chefs-d’œuvre miniatures [sont] faits d’or, d’émail, de perles, de pierres précieuses [et] sont largement diffusés en Europe et en Orient. » (Source : Caroline Junier et al., Automates et Merveilles : Une Exposition, 3 Villes, 3 Musées, 3 Catalogues, Neuchâtel, Alphil, coll. « Image et patrimoine », 2012, p.210.) Ils deviennent des objets de collection.

Il faut dire que nous n’avons conservé jusqu’à nos jours que très peu d’automates de ces grands créateurs du XVIIIe siècle. L’attrait provoqué par ces machineries n’en est que plus fort.

En outre, un artiste comme Vaucanson est non seulement un concepteur d’automates épatant mais aussi un « remarquable montreur [sachant] l’art d’exhiber ses mécaniques enchantées à la manière d’un bateleur. » (Source :  Collectif, L’Automate : Modèle Métaphore Machine Merveille, Bordeaux, Presses Universitaires, coll. « Mirabilia », p.505.) Cela n’est pas surprenant car dès l’Antiquité, les machines illusionnistes font fureur, comme l’atteste le succès des Pneumatiques de Héron d’Alexandrie, par exemple (Ier siècle av. J.C.).
Au XIXe siècle, cette mode s’intensifie et des inventeurs-prestidigitateurs donnent des spectacles qui trouvent encore un certain écho aujourd’hui. En témoignent les spectacles actuels de magie, usant encore de certains tours conçus à l’époque. Certains prestidigitateurs (le plus connu du grand public étant peut-être Dani Lary, puisqu’il passe régulièrement à la télévision) usent par exemple d’une ambiance steampunk (pour en savoir plus sur le steampunk, vous pouvez lire ce précédent article) pour agrémenter leur prestation et la rendre plus authentique, c’est-à-dire plus en accord avec l’idée que le spectateur d’aujourd’hui se fait des XVIIIe et XIXe siècles. Le succès des films comme Le Prestige ou L’illusionniste témoigne aussi de l’engouement du public pour la magie au sein d’univers uchroniques. Dans L’illusionniste, d’ailleurs, l’automate appelé L’Oranger merveilleux de Robert Houdin est réutilisé. Ce dernier (Harry Houdini, l’illustre prestidigitateur empruntera son nom), use de « l’ingéniosité de mécanismes secrets au service de tours de magie » (Source : Jean-Bruno Renard, « Fantômes et oracles à l’ère de la technologie », in Politica Hermetica – Deus ex machina, n°15, Lausanne, L’Age d’Homme, 2001, p.56). Science et art, par le biais de la prestidigitation, se retrouvent régulièrement alliées.
Les Jacquet-Droz manqueront d’ailleurs de passer sur le bûcher pour sorcellerie tant leurs créations paraissent prodigieuses.

L’orgue de barbarie : ancêtre des ordinateurs

Pourtant, point de magie dans toutes ces machines, sinon qu’elles parviennent à nous faire imaginer le contraire. En fait, l’art d’utiliser des cylindres s’appelle la tonotechnie.
Le CNRTL (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales), notamment conçu par le CNRS et qui est ni plus ni moins que LE dictionnaire que vous devriez tous utiliser, nous apprend que la tonotechnie est « l’art de noter de la musique sur les cylindres des orgues de Barbarie, des tabatières, pendules et tableaux à musique. » Le mot se compose notamment de l’élément « Tono » qui vient du grec signifiant « tension » ou « ton ».  L’élément « technie », lui, vient aussi du grec et signifie « art » ou « métier ». La tonotechnie serait, pour faire simple, l’art de donner le ton, le rythme grâce, en l’occurrence, à des cylindres à picots.

Exemple de carte perforée.
Exemple de carte perforée.

Or, cette technologie qui peut sembler un peu incompréhensible n’est pas si éloignée de celle que nous utilisons tous aujourd’hui. Et oui ! Car s’il y a une chose à laquelle les feuilles perforées de l’orgue de barbarie font penser, c’est aux cartes à trous (aussi surnommée la « carte IBM », du nom de son principal « constructeur ») utilisées par les premiers ordinateurs. Celles-ci ne diront rien aux plus jeunes lecteurs qui parcourront cette page mais mes parents, par exemple, ont eu l’occasion d’en manipuler eux-mêmes, au début de leur carrière professionnelle. Ca n’est donc pas si vieux ! (bon, un peu quand même :D)

En fait, nous pouvons même dire que nous utilisons toujours cette technologie car le code binaire, fait de 0 et de 1, et qui forme la base de tous les objets numériques d’aujourd’hui, n’est que le digne successeur de la tonotechnie.

Je vais tâcher de vous expliquer ça avec l’exemple de cette vidéo d’archive de l’INA, datant du 21 octombre 1960. Le présentateur de l’époque, Léon Zitrone, interviewe un fabriquant de machines utilisant des cartes perforées. Ses machines sont alors capables de trier 700 cartes par minute. On nous explique que cela permet de faire du tri de façon beaucoup rapide, automatisée et que l’opération peut être répétée une infinité de fois. Autrement dit, vous pouvez voir voir ces cartes perforées comme les « ancêtres » des résultats que vous affiche Google quand vous y effectuez une recherche : si vous tapez « Studinano » dans votre moteur de recherche préféré, par exemple, il vous affichera une liste plus ou moins longue de résultats, allant du plus probable au plus éloigné. Et bien, les cartes perforées avaient notamment ce rôle-là.

Sur le site d’IBM, qui fut le principal concepteur des cartes perforées, on  nous explique que chaque « trou » correspond à « un élément de donnée (1 bit) ». Autrement dit, la carte perforée est un moyen de stockage de données comme peuvent l’être nos clefs USB d’aujourd’hui.

guillemet« La première icône de l’ère de l’information est peut-être une simple carte perforée produite par IBM, généralement connue comme la «carte IBM». Mesurant approximativement 19 x 8 cm, ce morceau de papier est sans prétention, c’est certain. Mais, regroupées, les cartes IBM contiennent presque toutes les informations mondiales connues pendant un peu moins d’un demi-siècle — un exploit même d’après les mesures d’aujourd’hui. Elle grandit en popularité durant la grande crise de 1929, et est rapidement adoptée tant dans le monde du traitement de l’information que dans celui de la culture populaire. (…) Pendant près de 40 ans, c’est le principal support utilisé pour stocker, trier et relever les données traitées d’abord par du matériel mécanographique, puis par des ordinateurs. »

Source : La carte perforée IBM

Mécanisme Jacquard exposé au Musée des Arts et Métiers de Paris
Mécanisme Jacquard exposé au Musée des Arts et Métiers de Paris

Mais il est aussi intéressant de savoir que les métiers à tisser Jacquard, datant du tout début du XIXe siècle, utilisaient déjà des cartes à trous de ce genre pour fonctionner (voir la photographie ci-contre). Elles faisaient déjà office de « programme » (oui, comme un « programme » informatique) servant à faire réaliser tel ou tel motif par les machines. Or, ces machines utilisaient notamment une technologie à base de cylindres gravés (revoilà notre tonotechnie !), mise au point par Jacques de Vaucanson, dont je vous parlais plus haut. Ce dernier, en effet, concevait non seulement des automates mais fut aussi chargé d’automatiser les manufactures de soie. On se dit alors que tout est étrangement lié.

Bref, tout ça pour dire que vous ne le savez sans doute pas mais, finalement, chaque fois que vous manipulez un ordinateur, vous tissez. D’autant plus maintenant que nous surfons tous allégrement sur « la toile ».
Alors, comme disait le poète « j’fais des p’tits trous, des p’tits trous, encore des p’tits trous… » (allez, je ne résiste pas, je vous propose d’écouter cette magnifique chanson ci-dessous, interprétée par un Gainsbourg tout jeune, en 1959)


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Sources :
Site web de Patrick Mathis
Site de Pierre Bocuse (et de l’Abbaye de Collonges)

La tonotechnie (CNRTL)
La carte perforée IBM