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Works in progress : mes travaux étape par étape

Pour découvrir comment je travaille et comment avancent mes travaux en cours (ou ceux que j’ai depuis terminé mais que j’avais documenté tout au long de leur réalisation), je vous invite à naviguer dans les différentes catégories de cette page. Vous trouverez ici des « works in progress » (c’est-à-dire des travaux en cours de réalisation), des pas-à-pas et parfois des avant/après. C’est également dans ces articles que je regroupe les animations ou les vidéos montrant l’avancement de mes travaux, du début de leur réalisation à leur achèvement.
Bonne visite, petits curieux ! ;)

Cliquez sur une des miniatures pour accéder à la page dédiée de la ou des créations correspondantes.


Un Jardin d’Eden au Japon : Floating Flower Garden

L’œuvre dont je vais vous parler aujourd’hui est actuellement exposée au Miraikan de Tokyo (Musée des Sciences et de l’Innovation) mais elle fait parler d’elle par-delà les frontières.

Il s’agit d’une installation du collectif TeamLab, un groupe d’artistes japonais connu pour concevoir des œuvres utilisant les technologies. Or, l’œuvre dont il sera question ici est un savant mélange d’art et de science.


Sommaire de l’article

Les jardins suspendus de Babylone, version XXIe siècle
Art + Technologie + Nature : Un jardin hydroponique
Suspendre des fleurs : Pourquoi ? Pour quel effet ?
Plus exactement, les fermes verticales, qu’est-ce que c’est ?
Des fleurs… pour nos tombes ?
Pourra-t-on vivre à jamais dans nos jardins suspendus ?
En savoir un peu plus sur TeamLab


Les jardins suspendus de Babylone, version XXIe siècle

Intitulée Floating Flower Garden (« Jardin de Fleurs Flottantes »), l’œuvre est une installation immersive : il s’agit d’une salle remplie de pas moins de 2300 fleurs. Le spectateur entre dans la pièce et, peu à peu, les fleurs s’écartent sur son passage, comme si elles se mettaient à flotter autour de lui. Une fois qu’il est passé, elles redescendent. Ainsi, le spectateur se retrouve comme dans une bulle fleurie. Un jardin d’Eden. Magique !

Mais la technologie utilisée dans cette oeuvre ne se résume pas seulement au système « intelligent » qui détecte les mouvements du spectateur pour faire monter ou descendre les végétaux. Ce qui est surtout intéressant, en fait, c’est que ces fleurs sont bien vivantes : elles continuent de pousser, de grandir grâce à un procédé mis en place par TeamLab.

Même si TeamLab a gardé ce procédé secret, on peut penser qu’il s’agit d’un procédé d’hydroponie. Oula ! Ne fuyez pas, je vous explique : c’est un système permettant de faire pousser des plantes en dehors de la terre. Un système qui, dit-on, était déjà utilisé à Babylone, au sein des mythiques Jardins Suspendus ! Et un système qui est peu à peu en train de refaire surface et de se faire connaître du grand public depuis que l’idée de créer des fermes verticales, en plein cœur des villes, fleurit un peu partout sur la planète (vous trouverez plus de détails sur les fermes verticales plus bas dans cet article).

Art + Technologie + Nature : Un jardin hydroponique

« Flowers and I are of the same root, the Garden and I are one »Les fleurs et moi avons les mêmes racines, le jardin et moi sommes un. ») annonce la vidéo qui permet de se rendre compte de ce que donne vraiment cette installation (voir ci-dessus). Autrement dit, le visiteur est appelé à venir se confondre avec la nature, à ne faire plus qu’un avec elle. Le message porté est clairement écologique : nous possédons des racines communes avec les fleurs parce que nous partageons la même terre, parce que nous naissons sur la même terre et parce que nous ne pouvons naître que sur cette terre. En ne protégeant pas les fleurs (et la nature, plus largement), c’est aussi notre propre vie que nous mettons en danger. Ou, en tout cas, celle de nos enfants.

Le message est éculé mais il n’y a pas de mal à le rappeler encore une fois. D’autant plus que l’installation du collectif TeamLab semble faire l’unanimité sur au moins un critère : elle est superbe. Photo tirée de la vidéo présentant l'installation Floating Flower Garden ("Jardin de Fleurs Flottantes") de TeamLab. Photo tirée de la vidéo présentant l'installation Floating Flower Garden ("Jardin de Fleurs Flottantes") de TeamLab. Photo tirée de la vidéo présentant l'installation Floating Flower Garden ("Jardin de Fleurs Flottantes") de TeamLab. Photo tirée de la vidéo présentant l'installation Floating Flower Garden ("Jardin de Fleurs Flottantes") de TeamLab. Photo tirée de la vidéo présentant l'installation Floating Flower Garden ("Jardin de Fleurs Flottantes") de TeamLab.

Suspendre des fleurs : Pourquoi ? Pour quel effet ?

On peut, en effet, se demander d’où nous vient cette envie de suspendre des plantes.

Comme je le disais, cette œuvre de TeamLab peut faire penser aux plus célèbres jardins suspendus du monde : ceux de Babylone. Nous avons tous déjà entendu parler de ces jardins fabuleux. Pourtant, on ignore encore aujourd’hui s’il s’agissait d’un mythe ou d’une réalité…

Pour la petite histoire : Le Roi Nabuchodonosor II (assez célèbre puisqu’il apparaît notamment dans l’Ancien Testament, rien que ça, je vous passe les détails), aurait fait ériger ces jardins pour rappeler à son épouse les montagnes verdoyantes de son lointain pays. Romantique à souhait, non ? Le problème, c’est que les archéologues n’ont pas encore retrouvé les vestiges de cette construction. Nous n’avons donc pas de preuve indéniable de son existence (ce qui n’est pas le cas pour d’autres Merveilles du monde Antique comme la Bibliothèque d’Alexandrie, par exemple, dont nous savons qu’elle a véritablement existé).

En fait, tout ce dont nous disposons, ce sont des documents antiques racontant des témoignages encore plus anciens dont nous n’avons, là, par contre, aucune trace écrite… Pour le dire plus simplement : Bidule a raconté que Machin avait vu ça et que c’était génial ! Vous me suivez ?

Et c’est finalement au philosophe Philon d’Alexandrie que nous devons la description des jardins restée la plus célèbre : « Le jardin qu’on appelle suspendu, parce qu’il est planté au-dessus du sol, est cultivé en l’air ; et les racines des arbres font comme un toit, tout en haut, au-dessus de la terre ». (Source : Georges Roux, Architecture et poésie dans le monde grec, Maison de l’Orient Méditerranéen,‎ 1989, p. 301)

A la fin du film d'animation Le Château dans le ciel de Hayao Miyazaki, le château n'est finalement plus qu'un immense arbre volant.
A la fin du film d’animation Le Château dans le ciel de Hayao Miyazaki, le château n’est finalement plus qu’un immense arbre volant.

Ca ne vous rappelle rien ? Personnellement, des racines qui feraient comme un toit au-dessus de ma tête, ça me rappelle sacrément l’oeuvre de TeamLab, juste au-dessus. (bon, ok, Philon parle d’arbres, et je vous parle de fleurs, mais y’a de l’idée !)

Bon, même s’il est assez peu probable que le Roi Nabuchodonosor II ait réussi à trouver des architectes/ingénieurs/magiciens pour faire voler des arbres façon Château dans le Ciel, la légende reste belle et elle a surtout beaucoup marqué les esprits. Il est tout de même plus probable que ces jardins étaient des terrasses, tout « simplement » (pas si simplement que ça, en fait, mais plus simplement que s’ils avaient dû faire voler des arbres, disons). Notons quand même que Babylone était une ville fantastique pour l’époque. Il suffit de voir la magnifique Porte d’Ishtar (ci-dessous), également construite sous le règne de Nabuchodonosor II, pour en juger. Si les jardins suspendus ont véritablement existé, il suffit de voir la splendeur de cette porte pour imaginer à quel point ils devaient être sublimes !

La porte d'Ishtar au musée de Pergame (Berlin) Construite en 580 av. J.C. à Babylone. La porte d'Ishtar est une des huit portes de la cité intérieure de Babylone. Cette porte est dédiée à la déesse Ishtar.
La porte d’Ishtar au musée de Pergame (Berlin)
Construite en 580 av. J.C. à Babylone.
La porte d’Ishtar est une des huit portes de la cité intérieure de Babylone. Cette porte est dédiée à la déesse Ishtar.

Vous allez me dire, c’est bien beau tout ça, mais pourquoi cherche-t-on à faire flotter des plantes, alors ?

Faire sortir les plantes de la terre et réussir à les faire pousser, à les maintenir en vie malgré tout, c’est un peu jouer au dieu tout-puissant. Parce que c’est parvenir à dépasser les lois de la nature et à en créer de nouvelles pour son propre intérêt.

En fait, si Nabuchodonosor II avait fait construire ses jardins suspendus pour son épouse, nous avons aujourd’hui l’envie de construire des fermes verticales dans un but beaucoup plus prosaïque : nous ne pourrons pas toujours nourrir les habitants des villes, de plus en plus nombreux, avec nos champs et notre agriculture actuels. Tout simplement parce que nous manquerons de place et de ressources nécessaires. L’idée des fermes verticales serait donc de faire pousser les champs en hauteur et non plus à l’horizontal. De fait, il faudrait donc faire sortir de terre les végétaux que nous voudrions y faire pousser. Et revoilà nos rêves de jardins suspendus !

Plus exactement, les fermes verticales, qu’est-ce que c’est ?

Représentation en 3D pour le projet "Paris Smart City 2050".
Représentation en 3D pour le projet « Paris Smart City 2050 ».
Exemples de fermes verticales imaginées par l’architecte Vincent Callebaut pour Paris (Porte d’Aubervilliers).

Ce sont des fermes dans des gratte-ciel ; des champs en plein cœur de la ville !

Le jardin suspendu n’est pas seulement beau, il est aussi très pratique : la terre pèse lourd tandis que le procédé hydroponique qui permet la création de tels « jardins » (ou de fermes entières) et dont je vous parlais plus avant, permet de s’en passer totalement. On gagne donc en place.

Ferme verticale imaginée par l'architecte Blake Kurasek, 2008.
Ferme verticale imaginée par l’architecte Blake Kurasek, 2008.

Une place qui nous manque de plus en plus ! Car si la population mondiale augmente d’année en année, la place au sol, elle, reste la même. Il faut donc de plus en plus penser notre monde à la verticale : quand on ne peut plus s’étendre sur la terre, il faut envisager de grimper vers les cieux qui, eux, ont l’avantage d’être potentiellement infinis. Cela vaut pour les habitations (les immeubles en tout genre, les buildings, les gratte-ciel) mais cela risque de valoir pour de plus en plus d’autres choses. Notamment pour l’agriculture : c’est l’idée des fermes verticales.

Les fermes verticales ont aussi pour vocation de rendre les aliments de demain plus sains. L’hydroponie permet aussi cela puisqu’elle permet de donner aux plantes ce dont elles ont besoin pour vivre et pour se développer au mieux sans avoir recours à tous nos pesticides et autres produits chimiques d’aujourd’hui.
Notons d’ailleurs que si les plantes poussent en intérieur, il devient possible de faire en sorte que les nuisibles n’y aient pas accès. Les pesticides deviennent donc inutiles.

Ferme verticale imaginée par l'architecte Blake Kurasek, 2008. Aperçu de ce qui pourrait être cultivé à l'intérieur, sur les différents niveaux.
Ferme verticale imaginée par l’architecte Blake Kurasek, 2008.
Aperçu de ce qui pourrait être cultivé à l’intérieur, sur les différents niveaux.

De plus, au procédé hydroponique s’ajoutent des études poussées sur la lumière. Car les plantes auront toujours également besoin de lumière pour vivre. Avec les recherches menées notamment sur les LED (qui consomment peu et durent longtemps), il devrait devenir possible de faire pousser toutes sortes de plantes, aussi exotiques soient-elles, partout dans le monde. Y compris dans des régions où il était jusqu’alors impossible de les faire pousser.
Résultat ? Moins d’importation et donc moins de pollution due au transport des marchandises ; moins de pertes, de gâchis liés au temps de conservation des aliments ; et aussi moins de produits chimiques censés, justement, allonger le temps de conservation des aliments. Et, au final, si tout va bien, un coût plus bas pour le consommateur puisque tout sera conçu sur place, à deux pas de chez lui.

Voilà, pour résumer, le projet fou des fermes verticales. Reste à voir si le futur en fera une réalité ou si elles resteront de pures utopies architecturales !

Des fleurs… pour nos tombes ?

Avec un résultat à la fois proche et bien différent, l’artiste Rebecca Louise Law est également connue pour ses installations de « fleurs suspendues ». Elle n’utilise pas de technologie dans ses œuvres mais elle parvient aussi à nous faire vibrer grâce aux couleurs et aux formes des bouquets qui viennent habiller les plafonds des différents endroits qu’elle investit (musées, églises ou salle de théâtre, par exemple). Après tout, quoi de plus naturellement artistique qu’une fleur ?

Toutefois, ses fleurs coupées ne sont pas sans rappeler les fleurs que l’on vient déposer sur les tombes. Or, le mythe Babylonien est certes, merveilleux, mais il n’en est pas moins trouble : la cité glorieuse a aujourd’hui complètement disparu, elle n’a pas su éviter son déclin malgré ses trésors, sa technologie, son savoir. Si nous devons donc nous inspirer de cette ville, à n’en pas douter, nous devons aussi nous souvenir qu’elle ne fut pas immortelle. Les oeuvres de Rebecca Louise Law peuvent aussi donner l’impression que les fleurs nous tombent dessus ; une averse de fleurs nous tombent sur la tête, tombe sur notre monde. Quel sens donner à cela ? Doit-on y voir un espoir ou, au contraire, le signe de notre fin ? « Les feuilles mortes se ramassent à la pelle », disait le poète.
Installation de Rebecca Louise Law Installation de Rebecca Louise Law Installation de Rebecca Louise Law Installation de Rebecca Louise Law Installation de Rebecca Louise Law

Pourra-t-on vivre à jamais dans nos jardins suspendus ?

Gulliver découvrant Laputa, la ville volante. Gravure de J.J. Grandville, vers 1856.
Gulliver découvrant Laputa, la ville volante.
Gravure de J.J. Grandville, vers 1856.

Essayons d’être plus clair.

Comme nous l’avons vu, la description des jardins suspendus de Babylone par Philon d’Alexandrie peut rappeller le Château dans le Ciel de Hayao Miyazaki. Ce dernier s’est lui-même inspiré de la cité volante de Laputa, inventée dans Les Voyages de Gulliver par Jonathan Swift (1721) pour imaginer ce château-arbre volant.

Or, l’histoire que Hayao Miyazaki raconte autour de cette ville volante réinvente le mythe d’Icare : à vouloir s’approcher trop près du Soleil, on finit par se brûler les ailes. Autrement dit, si nous parvenons à nous élever de plus en plus (au sens propre comme au figuré), n’oublions pas de prendre garde car, en cas de problème, la chute sera d’autant plus rude.

A moins qu’il n’y ait plus jamais de chute possible ? C’est  ce qui arrive aux habitants fictifs de Laputa : ils ne se considèrent plus vraiment comme des êtres humains puisqu’ils vivaient au-dessus de la terre : ils oublient que l’homme ne peut pas vivre à jamais séparé de la « terre nourricière ». « Les fleurs et moi avons les mêmes racines, le jardin et moi sommes un » disait la vidéo de TeamLab : si une fleur doit pousser dans la terre, nous aussi, d’une certaine façon.

Dans le Château dans le Ciel, on sait que les habitants finissent par disparaître. On ne sait pas s’ils sont tous morts ou s’ils ont un jour tous décidé de regagner la terre ferme. Ils n’étaient en tout cas plus capables de vivre sur cette île volante. Il faut dire qu’elle était devenue plus dangereuse pour eux (et pour les habitants d’en-dessous) que véritablement bénéfique.

Il s’agit de ne pas confondre besoin (nous devons construire des fermes verticales car nous allons manquer de place au sol) et envie, voire vanité (créons des fermes verticales car on peut le faire et c’est cool !).

Du coup, on peut en effet se demander si, à long terme, l’hydroponie sera viable. Pourra-t-on faire à jamais pousser des plantes dans des tours ? Seront-elles d’aussi bonne qualité que celles poussant dans la terre ferme ?

Pieds de bok choy (chou chinois) empilés verticalement sur 30 pieds de haut (un peu moins d'un mètre) dans une ferme urbaine de Singapour. Les légumes tournent sur un support en forme de A afin de leur assurer un éclairage uniforme.
Pieds de bok choy (chou chinois) empilés verticalement sur 30 pieds de haut (un peu moins d’un mètre) dans une ferme urbaine de Singapour.
Les légumes tournent sur un support en forme de A afin de leur assurer un éclairage uniforme.

A l’heure actuelle, les tours verticales restent de lointains rêves d’architectes. En effet, de tels bâtiments seraient actuellement trop coûteux à réaliser et à maintenir à flot (d’après The Economist). Pourtant, l’écologiste Dickson Despommier, qui est à l’origine et développe l’idée des fermes verticales depuis une décennie, n’en démord pas : pour lui, ces fermes vont devenir, dans les prochaines années, de plus en plus indispensables. En particulier dans des îles-villes comme Singapour, où la densité de population est telle et le manque de place tellement problématique, que l’importation est une absolue nécessité. Pour espérer devenir plus indépendant, des chercheurs de Singapour sont d’ailleurs déjà en train de développer des procédés de culture verticale, sur l’idée de Dickson Despommier. Nous sommes encore loin des tours entières mais ces plantes poussent déjà sur quelques mètres de hauteur !

En savoir un peu plus sur TeamLab

Voilà tout se qui se cachait, selon moi, derrière l’œuvre du collectif TeamLab. Je vous invite vivement à aller farfouiller sur leur site car la plupart de leurs installations sont vraiment belles ! Je vous partage, ci-dessous, quelques photographies qui en sont issues mais toutes les vidéos sont disponibles sur leur site. Vous verrez que leurs œuvres concernent souvent la nature, avec une poésie toute japonaise et des couleurs pop vraiment plaisantes et attrayantes. On y retrouve autant l’influence d’Hokusai que de Ghibli et de l’art manga en général. Leurs oeuvres sont des jardins de synthèse où, pourtant, tout est fait pour vous faire oublier la machine et vous transporter dans un monde plus beau ; dans un rêve.

Une des phrases qui accompagne leur oeuvre Flowers and People résume d’ailleurs assez bien cet article : « Flowers and People, Cannot be Controlled but Live Together » (« Les Fleurs et les Gens ne peuvent pas être contrôlés mais peuvent vivre ensemble. ») A méditer !


Cet article vous a plu ? Ou ne vous a pas plu du tout ? Vous avez quelque chose à ajouter, à corriger ? Tout simplement quelque chose à dire, un avis ? N’hésitez pas : les commentaires sont là pour ça ! :)

Et n’oubliez pas, « il faut cultiver notre jardin » disait Voltaire !

Sources :
Site officiel de TeamLab
Site officiel de Blake Kurasek
Urban Attitude, « Les fermes verticales, la révolution agroalimentaire est en marche », Octobre 2013

L’éléphant de la Bastille

Aquarelle de Jean-Antoine Alavoine (1776-1834) Dernier projet pour la fontaine de l'Éléphant de la Bastille (1809-1810) H : 41 cm, L : 51,8 cm L'aquarelle est contresignée par Vivant Denon et Alavoine (architecte du projet) Musée du Louvre, Paris
Aquarelle de Jean-Antoine Alavoine (1776-1834) Dernier projet pour la fontaine de l’Éléphant de la Bastille (1809-1810) H : 41 cm, L : 51,8 cm L’aquarelle est contresignée par Vivant Denon et Alavoine (architecte du projet) Musée du Louvre, Paris

Cet éléphant, pour le moins monumental, aurait pu être construit au beau milieu de la Place de la Bastille à Paris !

Ce que je vous propose de voir ici est une aquarelle de Jean-Antoine Alavoine (1776-1834). Il s’agit du dernier projet pour la fontaine de l’Elephant de la Bastille (1809-1810). Elle se trouve aujourd’hui au Musée du Louvre à Paris. Vous allez me dire, c’est bien beau, mais qu’est-ce que c’est que cette histoire d’éléphant !? Pourquoi ? Comment ?

Un éléphant géant pour… Napoléon !

Je ne vous le cache pas, il s’agissait d’un projet napoléonien. Même si cela peut aujourd’hui nous sembler absurde, l’éléphant portait en lui une riche symbolique qui expliquait le souhait du souverain :

  • Il représentait l’image du pouvoir :
    1. François Ier l’avait fait figurer sur une fresque du château de Fontainebleau comme symbole du pouvoir royal.
    2. Mais l’animal pouvait aussi faire référence aux conquérants antiques comme Alexandre Le Grand ou Hannibal, célébrant ainsi indirectement les conquêtes napoléoniennes comme des héritières.

      L'éléphant comme symbole du pouvoir royal (fresque de Rosso pour Fontainebleau, 1534-1540).
      L’éléphant comme symbole du pouvoir royal (fresque de Rosso pour Fontainebleau, 1534-1540).
  • Il rappelait aussi le goût de l’époque pour l’Orient :
    • Badge_of_the_Order_of_the_Elephant_heraldique
      Emblème de l’Ordre de l’Eléphant

      Napoléon était allé en Égypte. Pays d’où il avait ramené l’Obélisque que nous pouvons toujours admirer sur la Place de la Concorde à Paris. Napoléon se voit aussi offrir les sabres de Tamerlan et de Thamas Kouli-Khan, deux grands dirigeants et conquérants, par un ambassadeur du shah de Perse.  Mais, surtout, le 18 mai 1808, il est fait chevalier de l’Ordre de l’Éléphant par le roi Frédéric VI de Danemark. Et devinez quel est l’emblème de cet ordre ? Un éléphant portant une tour…

    • Mais le XIXe siècle est aussi connu pour son mouvement Orientaliste, marqué par l’intérêt de cette époque pour les cultures d’Afrique du Nord, turque et arabe, toutes les régions dominées par l’Empire Ottoman, jusqu’au Caucase. Parmi les artistes ayant pu être Orientalistes, il y a de grands noms : Ingres, Delacroix, Renoir, Picasso, Matisse,… Le Douanier Rousseau participe également à créer un certain goût pour l’exotisme.

      Jean Auguste Dominique Ingres, La Grande Odalisque, 1814, Louvre, Paris
      Jean Auguste Dominique Ingres, La Grande Odalisque, 1814, Louvre, Paris
    • Gravure de Léon Bennett illustrant l'éléphant du roman La Maison à Vapeur de Jules Vernes (1880).
      Gravure de Léon Bennett illustrant l’éléphant du roman La Maison à Vapeur de Jules Vernes (1880).

      En littérature, Jules Verne est également de ceux qui alimentent cette passion pour l’Ailleurs grâce à tous ses Voyages Extraordinaires. Dans La Maison à vapeur, roman de 1880, Jules Vernes raconte d’ailleurs l’histoire d’un gigantesque éléphant à vapeur, tirant deux wagons tout confort et étant même amphibie.

    • Plus largement, le XIXe siècle crée les Expositions Universelles. Ces lieux immenses, occupant souvent une large partie des villes qui les accueillent, comme Paris ou Londres, sont l’occasion de découvrir de nouvelles cultures. Parmi mille et une autres merveilles, des pavillons nationaux sont dressés. En 1900, par exemple, Paris accueille l’Exposition Universelle et le public peut y visiter les pavillons de la Finlande, de la Suède, des Etats-Unis, de l’Allemagne, de la Hongrie, de l’Empire Ottoman, de l’Italie, de la Bosnie-Herzégovine, de la Russie, de la Belgique ou encore de la Grèce. (à l’occasion, je vous écrirai un article sur les Expositions Universelles car elles me fascinent littéralement !)
      Voici quelques photographies (certaines ont été colorisées) montrant à quel point l’architecture de ces pavillons pouvait être orientalisante (même quand cela n’avait pas forcément de lien avec ce qui était exposé, comme pour le Palais des Mines et de la Métallurgie) :
  • Et puis, l’éléphant étant un animal aimant l’eau, il n’était pas idiot de l’imaginer jouer le rôle d’une fontaine. Tout simplement.

De mémoire d’éléphant, on avait déjà vu ça quelque part !

Eléphant portant un Howdah.
Eléphant portant un Howdah.

D’après les images du projet, l’éléphant devait être pourvu d’une tour qu’il porterait sur son dos.

Cette tour était censée rappeler un howdah. On appelle un howdah la sorte de palanquin (ou de siège) que portent les éléphants et qui servent, notamment, à transporter des personnes. Initialement, ces howdah étaient installés sur ces animaux pour chasser ou faire la guerre. Il s’agissait d’un symbole de richesse pour son propriétaire et il pouvait être très richement décoré.
La tour portée par l’animal devait donc évidemment servir à symboliser le pouvoir de Napoléon et, plus globalement, celui de la France.

Ca n’était cependant pas une idée nouvelle puisque des éléphants pourvus de tours avaient déjà été représentés dans des enluminures datant du Moyen-Age.

Représentation médiévale d'un éléphant de guerre (enluminure du XIVe siècle).
Représentation médiévale d’un éléphant de guerre (enluminure du XIVe siècle).

Mais, pourquoi une tour, me direz-vous ? Après tout, les howdah ne ressemblent pas à des tours, c’est assez absurde, non ? L’enluminure que je vous propose de voir ci-dessus date du XIVe siècle. C’est la fin du Moyen-Age et il y a eu plusieurs périodes de Croisades qui ont dû faire parvenir jusqu’en Europe des histoires d’éléphants de guerre. Mais ce ne sont jamais que des histoires ! Des mots ! Je vous laisse imaginer : vous êtes français, au XIVe siècle (contexte : Guerre de Cent Ans, Peste Noire… c’est une période assez joyeuse, vous voyez ?), vous n’avez jamais vu un éléphant de toute votre vie et quelqu’un vous raconte que des gens, dans des pays lointains où il fait toujours beau, se battent dans des sortes de tours portées par des animaux énormes appelés « éléphants ». Ce sont un peu leurs chevaux à eux, leur cavalerie. Oh et, ces animaux ont une trompe : c’est une sorte de gros tuyau qu’ils ont à la place du nez… Voilà. Et bien dites-vous que les enlumineurs devaient, grosso-modo, représenter des éléphants de guerre à partir de descriptions de ce genre (ok, j’ai peut-être un peu grossi le trait, mais vous voyez l’idée ?).

Mais un éléphant portant une tour, on en trouve également un, sous la forme d’une sculpture, dans les jardins de Bomarzo en Italie (voir ci-dessus). Considérés comme les jardins les plus extravagants de la Renaissance italienne, ils datent du XVIe siècle et on y trouve notamment des obélisques et des sphinx. Je dis « notamment » car on y trouve vraiment des sculptures très… étranges et appartenant à des cultures assez différentes. Par exemple : Protée, divinité marine ayant le don de métamorphose, dont la tête sortant du sol porte sur son crâne les armoiries de la famille Orsini (les commanditaires du jardin) ; Hercule écartelant Cacus qu’il maintient la tête en bas ; Vénus sur une conque (un coquillage) retournée dans une niche ; Une nymphe endormie sur laquelle veille un petit chien ; Cerbère, le chien à trois têtes qui garde la porte des Enfers ; une tortue portant sur sa carapace une Renommée ailée (c’est une divinité grecque) soufflant dans deux trompettes (détruites), en équilibre précaire sur un globe terrestre ; un Orque ( ou une sorte de baleine monstrueuse) la gueule ouverte, semblant attendre un faux pas de la tortue ou des promeneurs… ; une maison penchée… etc. Et au milieu de tout ça, donc, un éléphant de l’armée d’Hannibal soulevant un légionnaire romain.
Bref, l’histoire de ce parc est encore assez mystérieuse. Je vous laisse deviner pourquoi…

Salvador Dali, Le triomphe de l'éléphant, 1975
Salvador Dali, Le triomphe de l’éléphant, 1975-1984 Sculpture en bronze, patine vert émeraude, ange doré.

Pause précision : Si dans le jardin italien de Bomarzo on trouve donc une tortue portant une Renommée ailée, en 1975 Salvador Dali, lui, avait justement réalisé la sculpture d’un éléphant portant aussi une sorte de Renommée soufflant dans une trompette (le plus souvent, les descriptions parlent en fait d’un ange, tout simplement). Cette sculpture s’intitule Le Triomphe de l’Eléphant ou Eléphant de Triomphe (c’est selon les traductions, j’ai l’impression que personne ne sait vraiment… En tout cas, voir ci-contre). Malheureusement, on ne peut pas dire que la photo lui rende hommage… En réalité, cette sculpture est assez grande et impressionnante car elle mesure environ 265 cm.
Chez Dali, les éléphants étaient symbole d’avenir. Ils étaient une de ses images favorites et ils les représentaient souvent perchés sur de longues jambes frêles, comme ici, ressemblantes à des pattes de girafe squelettiques ou d’étranges moustiques. L’ange, jouant de la trompette, annonce une ère nouvelle. Le fait qu’il soit fait d’or signifie probablement qu’il s’agira d’une ère prospère. Mais l’éléphant, lourd et massif, a des pattes vraiment fines, dont la fragilité annonce des difficultés certaines. (Source)

La fontaine de l'éléphant, projet d'Alavoine (vers 1813-1814). Vue exposée au Salon de 1814, chromolithographie Paris, musée Carnavalet.
La fontaine de l’éléphant, projet d’Alavoine (vers 1813-1814).
Vue exposée au Salon de 1814, chromolithographie
Paris, musée Carnavalet.

Un des projets d’Alavoine sera même exposé au Salon de 1814 ! Il s’agit d’une gravure qui se trouve aujourd’hui au Musée Carnavalet (voir ci-dessus). Autant vous dire qu’il semblait tenir à ce projet et qu’il était tout-à-fait officiel.

Place de la Bastille vue depuis le 4e arrondissement ; au centre la colonne de juillet et à droite l'opéra Bastille.
Place de la Bastille vue depuis le 4e arrondissement ; au centre la colonne de juillet et à droite l’opéra Bastille.

D’ailleurs, on réalisa bel et bien le bassin et le socle de la fontaine et ceux-ci sont encore visibles de nos jours, sous la Colonne de Juillet.

Plus fort encore, un modèle en plâtre à l’échelle 1 fut même réalisé près du chantier avant d’être détruit ! On peut supposer, d’après les plans du projet d’Alavoine, que ce modèle mesurait 16 mètres de long et 24 mètres de haut, dont 15 mètres uniquement pour l’éléphant et la tour que devait supporter son dos (je vous laisse imaginer…).

La maquette en plâtre dans son hangar en 1830-31 (gravure d'après un dessin de Pugin père).
La maquette en plâtre dans son hangar en 1830-31 (gravure d’après un dessin de Pugin père).

Un éléphant bien misérable…

Victor Hugo fera de cette maquette le logement de fortune de son jeune personnage, Gavroche, dans Les Misérables (1862). Ce qui n’est pas totalement fou puisqu’on sait qu’avant d’être détruit, l’éléphant servit effectivement de refuge à des sans-abris, voire à des malfaiteurs, en plus d’héberger un certain nombre de rats (il avait été laissé complètement à l’abandon…).

guillemet« Il y a vingt ans, on voyait encore dans l’angle sud-est de la place de la Bastille, près de la gare du canal creusée dans l’ancien fossé de la prison-citadelle, un monument bizarre qui s’est effacé déjà de la mémoire des Parisiens (…).
C’était un éléphant de quarante pieds de haut, construit en charpente et en maçonnerie, portant sur son dos sa tour qui ressemblait à une maison, jadis peint en vert par un badigeonneur quelconque, maintenant peint en noir par le ciel, la pluie et le temps. Dans cet angle désert et découvert de la place, le large front du colosse, sa trompe, ses défenses, sa tour, sa croupe énorme, ses quatre pieds pareils à des colonnes faisaient, la nuit, sur le ciel étoilé, une silhouette surprenante et terrible. »

Source : Victor Hugo, Les Misérables (livre sixième, Le petit Gavroche), 1862

En 1831, un certain Levasseur en était apparemment le gardien (auto-proclamé ?) et vivait dans une de ses pattes. Malheureusement, le pachyderme était dans un tel état de délabrement qu’il ne pouvait plus être visité.

L’éléphant ne fut démonté qu’en 1846. Le Cocher du 2 août 1846, rapportant la démolition du modèle, précise qu’« il en est sorti plus de deux cents rats ».

Sur cette lithographie de Ph. Benoist, on peut voir la maquette de l'éléphant, à droite de la Colonne de Juillet.
Sur cette lithographie de Ph. Benoist, on peut voir la maquette de l’éléphant, à droite de la Colonne de Juillet.
Autre vue de l'éléphant de la Bastille, près de la Colonne de Juillet. (je n'ai pas pu trouver de qui était cette image, ni de quand elle datait exactement, mais il pourrait s'agir d'une gravure de Fedor Hoffbauer).
Autre vue de l’éléphant de la Bastille, près de la Colonne de Juillet.
(je n’ai pas pu trouver de qui était cette image, ni de quand elle datait exactement, mais il pourrait s’agir d’une gravure de ou d’après Fedor Hoffbauer).

Mais où est donc passé l’éléphant ? Pourquoi n’a-t-il pas vu le jour ?
Je vous vois venir ! « Bah… Parce que c’était un éléphant géant. Quelle idée d’aller construire ça sur la Place de la Bastille ! » Et, ma foi… Vous n’avez pas vraiment tort (même si, à titre purement personnel, j’aurais trouvé ça particulièrement osé et génial, mais je suis une excentrique, vous savez :D). Certains pensaient effectivement que cette idée était un peu grotesque (bon, pas au point de le dire comme ça, tout net, à Napoléon quand même). Mais c’est surtout la fin de l’Empire qui signa son arrêt de mort.

On essaya de lui imaginer une autre place dans Paris, des années durant, mais le projet fut finalement complètement abandonné puis progressivement oublié…

Un éléphant, ça trompe énormément

Oublié ? Non ! Un petit village gaulois résiste encore et… Ah non, c’est autre chose, ça. Non, l’éléphant n’a pas été complètement oublié.

C’est un ami qui m’a éclairé sur cette partie de l’histoire à côté de laquelle j’avais failli passer ! (Merci Mathieu !)

Conseil-general-du-nord-l-elephant-de-la-memoireJe vous raconte : en 1989, la France fête le bicentenaire de la Révolution. A cette occasion, un modèle de l’éléphant est recréé : il mesure 13 mètres de haut, 11 mètres de long et 4,30 mètres de large. Le palanquin (ou la tour, car il s’agit encore d’une tour) qui le surmonte sert de lieu d’animations et d’expositions. Il est surnommé l’Éléphant de la Mémoire (parce que, tout le monde le sait, un éléphant a une grosse mémoire, une mémoire d’éléphant !).

Seulement voilà, l’animal a un prix : 7 millions de francs à l’époque (un peu plus d’1 million d’euros) et cela n’est pas au goût de tout le monde (encore une fois, décidément il ne met personne d’accord, cet animal !).

Et puis, pourquoi avoir choisi de réactualiser un projet napoléonien pour illustrer la Révolution ? J’avoue que je n’ai pas trouvé la réponse à cette question très évidente. En tout cas, les réponses que j’ai pu m’inventer étaient un peu tirées par les cheveux… Du coup, je suis restée sur l’idée qu’il représentait bien la Mémoire de la France, toutes périodes confondues, et pas seulement la Révolution. Pourtant, l’Éléphant de la Mémoire avait été conçu pour une raison précise : en mémoire à Gavroche, le personnage de Victor Hugo. Par conséquent, dans son ventre, une salle de projection avait été installée pour dénoncer le travail des enfants dans nos sociétés. Encore aujourd’hui, il s’agit d’une des plus petites salles de cinéma au monde.

Photo de l'éléphant dans un des bâtiments désaffecté du site minier de Wallers-Arenberg (2014). Photo de Mikaël Libert pour le journal 20 Minutes.
Photo de l’éléphant dans un des bâtiments désaffecté du site minier de Wallers-Arenberg (2014).
Photo de Mikaël Libert pour le journal 20 Minutes.
Photo de l'éléphant dans un des bâtiments désaffecté du site minier de Wallers-Arenberg (2014).
Photo de l’éléphant dans un des bâtiments désaffecté du site minier de Wallers-Arenberg (2014).

Malgré ça, l’animal trône un mois sur l’Esplanade de Lille puis entreprend un périple dans le département du Nord-Pas-de-Calais avant d’aller jusqu’à Paris et Bruxelles. Il faut pas moins de six semi-remorques pour transporter la bête gigantesque qui pèse environ 17 tonnes… (elle est, bien sûr, découpée en morceaux, mais quand même)

Pour lui éviter d’avoir été construit pour rien, on imagine que de continuer « à le promener comme vitrine des traditions et de la technologie nordistes. Ou l’installer à demeure dans un parc urbain » nous explique La Voix du Nord dans un article de 2014. C’était sans compter un changement de majorité au Conseil Général… (je ne vous dis pas en faveur de quel côté, gauche ou droite, je vous laisse deviner, ça n’est pas très dur) Et voilà à nouveau l’éléphant reclus, oublié dans un vieux bâtiment désaffecté du XIXe siècle, sur l’ancien site minier de Wallers-Arenberg (pour ceux qui ne sont pas du coin, c’est bien là où passe le tour cycliste Paris-Roubaix quand on parle de la mythique « tranchée d’Arenberg »).

Un éléphant qui déménage !

arkoes-douai
Logo du Musée-Parc Arkéos.

MAIS VOILA ! Coup de théâtre : « Le conseil général du Nord a trouvé un amateur pour l’encombrant pachyderme, qui y est entreposé depuis 1992. Cet amateur, c’est la communauté d’agglomération du Douaisis (CAD), pour son musée-parc archéologique Arkéos » annonce encore La Voix du Nord.
Le musée-parc en question a ouvert ses portes en juin 2014 et nous promet l’arrivée de « L’éléphant de la mémoire » pour 2015 (initialement, pour fin 2014, mais il semble que ça n’est pas encore été fait, à ma connaissance).

Photo du Musée-Parc archéologique "Arkéos" de Douai.
Photo du Musée-Parc archéologique « Arkéos » de Douai.

De son côté, il faut dire que « l’ancien site minier d’Arenberg, situé à Wallers, est en pleine métamorphose », comme le résume le journal 20 Minutes « Il prévoit notamment de construire un laboratoire de recherche sur les usages de la télévision de l’université de Valenciennes, dont les travaux ont débuté en avril 2014. » (Source : Mikaël Libert, « Arenberg: de la mine à l’écran », Journal 20 Minutes, mai 2014).

La ville va, peu à peu, accueillir La Fabrique à Images, « un lieu dédié à la recherche et à l’innovation pour le cinéma et l’audiovisuel », en coopération avec l’Université de Valenciennes et du Hainaut Cambrésis (dans laquelle j’étudie depuis maintenant quelques années, juste pour info). « Une belle reconversion en perspective pour le site emblématique, explique le site de l’Université, puisque le projet prévoit l’implantation d’ici 2015 du laboratoire DeVisu de l’université, centré sur les technologies innovantes dans l’audiovisuel et les médias numériques. »

Pour information, le projet de la Fabrique à Images à Wallers-Arenberg fait partie d’un projet plus global, comprenant deux autres sites universitaires du Nord pour former le Pôle Images : La Serre Numérique des Rives de l’Escaut à Valenciennes (actuellement en construction, ce pôle a pour vocation de toucher tous les champs de la création numérique : jeu vidéo, animation, serious game, univers virtuels, simulation industrielle, design urbain, design produit…) et La Plaine Images implantée à Tourcoing mais regroupant des écoles de l’agglomération lilloise (elle est consacrée à l’image et aux industries créatives : jeu vidéo, animation, audiovisuel, images de synthèse, cinéma, réalité augmentée, 3D, interactions tactiles et gestuelles, serious game…).

Malheureusement, Wallers-Arenberg, qui avait notamment servi de lieu de tournage pour le film Germinal (sorti en 1993, avec notamment le chanteur Renaud, dans le rôle titre inspiré du roman d’Emile Zola), n’avait pas trouvé de place à donner à cet éléphant un peu trop imposant. C’est donc Douai qui en fait l’acquisition pour l’euro symbolique. Et, pour ma part, j’ai donc hâte de voir l’animal sortir de l’ombre et j’irai le visiter avec plaisir quand ce sera chose faite !

Photo du Grand éléphant de L'île de Nantes.
Photo du Grand éléphant de L’île de Nantes.

Résultat, comme c’est le cas à Nantes depuis plusieurs années (avec les Machines de L’île de Nantes), la ville de Douai devrait bientôt accueillir son éléphant à visiter. Contrairement à son compatriote nantais, il n’arpentera pas la ville mais, après tout, et avec une histoire pareille, il aura déjà bien voyagé !
Du coup, nous lui souhaitons autant de succès et, surtout, de ne plus être oublié.

Mise à jour 2022 :

L’éléphant n’a pas déménagé et se trouve toujours à Arenberg, dans ce qui est devenu Arenberg Creative Mine et je croise les doigts pour qu’il reste là et soit enfin remis en lumière ! En ce qui me concerne, avec ma thèse, j’ai plein de projets pour lui, en tout cas, si jamais ;D

Alors ? Il vous aurait plu, à vous, cet éléphant de la Bastille ? Si oui (ou non !), n’hésitez pas à laisser un petit commentaire ci-dessous !


Sources :
Paris ZigZag, L’éléphant de la Bastille, novembre 2012
Bernard Défontaine, « Wallers : l’Éléphant de la Mémoire va-t-il enfin sortir de l’oubli ? », La Voix du Nord, 25/04/2014
Ecole d’Architecture Université de Navarre, Paris : The town squares
Mikaël Libert, « Arenberg: de la mine à l’écran », Journal 20 Minutes, mai 2014

Si tu tends l’oreille, peut-être rencontreras-tu le Baron

baron-the-cat-returns-le-royaume-des-chats
Andrew Michel Golden – The Baron in Real Life
Photomontage
2012

Voici ce à quoi ressemblerait le Baron Humbert von Gikkingen, célèbre personnage des studios d’animation Ghibli, dans la « vraie » vie. L’artiste Andrew Michael Golden s’est amusé à transposer les personnages du studio japonais (dont fait notamment partie Hayao Miyazaki) dans des vraies-fausses photographies « vintages ».

Mais ça n’est pas l’œuvre de Andrew Michael Golden qui va nous intéresser ici. En fait, j’ai choisi de vous parler du Baron parce que l’histoire de ce chat fictif est une de celles qui me tient le plus à cœur. Et elle fait l’objet de deux films d’animation à la fois différents et complémentaires : Si tu tends l’oreille et Le Royaume des chats.

Si tu tends l'oreille, 1995Si tu tends l’oreille
Auteur : Aoi Hīragi
Réalisateur : Yoshifumi Kondo
Scénariste : Hayao Miyazaki
1990Passionnée de lecture, Shizuku Tsukishima fréquente assidûment la bibliothèque municipale, où travaille son père, ainsi que celle de son collège.
Mais à force d’emprunter des livres, elle remarque grâce aux fiches de suivi que tous les livres qu’elle a emprunté l’ont déjà précédemment été par un certain Seiji Amazawa…
Le Royaume des Chats (2002)Le Royaume des Chats
Auteur : Aoi Hīragi
Réalisateur : Hiruyoki Morita
2002Un beau jour, Haru, lycéenne de dix-sept ans, sauve de justesse un chat qui allait être écrasé par un autobus. Mais l’animal s’avère être le fils du roi du Royaume des chats. Pour la remercier, le roi décide de l’inviter dans son pays et de lui donner son fils en mariage…
Shizuku, l'héroïne du film, découvre le Baron. (Si tu tends l'oreille, 1990)
Shizuku, l’héroïne du film, découvre le Baron.
(Si tu tends l’oreille, 1990)

Le Baron Humbert von Gikkingen apparaît d’abord dans le très touchant Si tu tends l’oreille en 1990. Dans ce film d’animation, il n’est qu’une statuette qu’un vieil homme garde précieusement en souvenir de l’amour de sa vie, perdu de vue durant la guerre.

Les yeux de la statuette du Baron semblent étrangement vivants...
Les yeux de la statuette du Baron semblent étrangement vivants… Je vous assure ! Regardez attentivement.
(Si tu tends l’oreille, 1990)
Les statuettes du Baron et sa de compagne, avant leur séparation. (Si tu tends l'oreille, 1990)
Les statuettes du Baron et de sa compagne, avant leur séparation. (Si tu tends l’oreille, 1990)

On apprend que la statuette du Baron formait en réalité un duo avec une autre figurine (représentant sa compagne). Cette dernière a été emportée par la femme perdue de vue par le grand-père.
Les retrouvailles de ces deux chats sculptés auraient symboliquement scellé celles de quatre amoureux mais elles n’auront jamais lieu.
A la place, la jeune héroïne du film, Shizuku, décide de s’inspirer de l’histoire du Baron et se met à écrire un roman dans lequel tout est bien qui finit bien. Elle trouve ainsi sa voie : l’écriture.

La statuette du Baron chez le vieil homme. (Si tu tends l'oreille, 1990)
La statuette du Baron chez le vieil homme.
(Si tu tends l’oreille, 1990)

L’histoire qu’invente Shizuku dans ce roman est très proche de celle que raconte Le Royaume des Chats (2002), l’autre film d’animation dans lequel le Baron apparaît. Cette fois, il est l’un des personnages principaux.
Il n’est pas dit clairement que Le Royaume des Chats est l’histoire inventée par l’héroïne de Si tu tends l’oreille mais cela tiendrait la route.

Toutefois, les deux films ont beau se compléter, ils sont aussi très différents : Si tu tends l’oreille se voulait réaliste, racontant une période de la vie d’une jeune fille en quête de ses rêves d’avenir, Le Royaume des Chats est, lui, totalement fantastique.
En effet, l’héroïne, nommé Haru, se retrouve propulsée dans un monde parallèle uniquement habité par des chats (évidemment !).

A mes yeux, Le Royaume des Chats est une sorte d’Alice au pays des Merveilles revisité. Nous en avons tous les ingrédients : des animaux qui parlent, des tunnels menant d’un monde à l’autre, des personnages qui grandissent ou rapetissent, des souverains fous dangereux et une aventure qui joue souvent le loufoque de façon pas toujours très sympathique, voire un peu inquiétante.

Haru, l'héroïque du film, découvre avec stupeur la maison du Baron. Et elle y est un peu à l'étroit. (Le Royaume des chats, 2002)
Haru, l’héroïque du film, découvre avec stupeur la maison du Baron. Et elle y est un peu à l’étroit.
(Le Royaume des chats, 2002)
Haru est invité à prendre le thé par le Baron. Elle rencontre aussi Mouta, l'un de ses fidèles amis.
Haru est invité à prendre le thé par le Baron. Elle rencontre aussi Mouta, l’un de ses fidèles amis.
Le Baron est, semble-t-il, bien le même que dans Si tu tends l'oreille (1995) : on peut voir, derrière lui, le portrait de sa compagne perdue.
Le Baron est, semble-t-il, bien le même que dans Si tu tends l’oreille (1995) : on peut voir, derrière lui, le portrait de sa compagne perdue.
Haru est emportée, hors de la maison du Baron, par une horde de chats. Direction, le Royaume des chats !
Haru est emportée, hors de la maison du Baron, par une horde de chats. Direction, le Royaume des chats !
La horde de chats passe par des tunnels magiques pour rejoindre le Royaume des Chats.
La horde de chats passe par des tunnels magiques pour rejoindre le Royaume des Chats.

Et puis, je ne sais pas vous, mais pour moi, la tenue bleue et blanche de l’héroïne, rappelle quand même sacrément celle de la Alice de Disney. Non ?
Sans compter que, comme par hasard, le style du Baron et celui de sa maison, notamment, rappellent vraiment la mode du XIXe siècle (époque où Alice au pays des Merveilles a été écrit par Lewis Carroll, puisque le roman date de 1865).

De plus, dans les deux œuvres, il est difficile de savoir si l’héroïne n’est pas seulement en train de rêver. Alice et Haru sont, en tout cas, propulsées dans une aventure rocambolesque qui les amènera à grandir.

Au milieu de tout ça, le Baron est un Chapelier pas si fou, qui tente, tant bien que mal, de sauver Haru. Dans Si tu tends l’oreille, il sauve également Shizuku, d’une certaine façon, en devenant sa source d’inspiration : elle découvre ainsi qu’elle rêve de devenir écrivain.

Le Baron prenant vie dans le roman de l'héroïne de Si tu tends l'oreille (1990).
Le Baron prenant vie dans le roman de l’héroïne de Si tu tends l’oreille (1990).

L’autre personnage qui fait le lien entre Le Royaume des chats et Si tu tends l’oreille, est le gros chat blanc à l’oreille sombre nommé Mouta (ou Muta). Dans Si tu tends l’oreille, c’est lui qui guide, sans le faire exprès (ou peut-être pas tout à fait, allez savoir !) la jeune Shizuku jusqu’à la demeure du vieil homme possédant la statuette du Baron.
Étrange coïncidence (ou peut-être pas, une fois encore) : la maison du grand-père est étrangement semblable à celle du Baron dans Le Royaume des chats. N’est-il pas un peu le Lapin Blanc de l’histoire ? A la différence qu’il se distingue plutôt par son flegme de grincheux paresseux, là où le Lapin, lui, est sans cesse en mouvement et plein d’énergie puisqu’il est en retard.

On peut se demander si Shizuku écrit donc bel et bien son roman ou si elle n’est pas inconsciemment guidée par une magie qui lui échappe (celle des chats, ndlr). La question reste en suspend, bien sûr, après visionnage des deux films. Et c’est là que l’imagination prend le relais.

En haut : Muta aux côtés de Shizuku dans Si tu tends l'oreille (1990) En bas : Muta tournant le dos à Haru dans Le Royaume des chats (2002)
En haut : Muta aux côtés de Shizuku dans Si tu tends l’oreille (1990)
En bas : Muta tournant le dos à Haru dans Le Royaume des chats (2002)
En haut : devanture de la maison du Baron. (Le Royaume des chats, 2002) En bas : devanture de la maison du grand-père. (Si tu tends l'oreille, 1990)
En haut : devanture de la maison du Baron. (Le Royaume des chats, 2002)
En bas : devanture de la maison du grand-père. (Si tu tends l’oreille, 1990)

Enfin, des chats qui se mettent à marcher sur deux pattes, à parler et se conduire comme des hommes, c’est une chose, mais j’ai surtout retenu que, dans Le Royaume des chats, cela se passait la nuit : ainsi, quand Haru arrive devant la maison du Baron, il fait encore jour et, en regardant par la petite fenêtre, la jeune fille ne voit qu’une statuette de chat inanimée. Le soleil se couche, ensuite, et la figurine prend vie.

Il fait encore jour quand Haru arrive devant la maison du Baron : il n'est donc encore qu'une statuette.
Il fait encore jour quand Haru arrive devant la maison du Baron : il n’est donc encore qu’une statuette.

Curieusement, je trouve que la peinture de Théophile-Alexandre Steinlen, intitulée L’Apothéose des chats à Montmartre, montre quelque chose d’assez semblable, à sa façon.

Théophile-Alexandre Steinlen, Tournée du Chat noir, 1896
Théophile-Alexandre Steinlen, Tournée du Chat noir, 1896,
135,9 × 95,9 cm,
The Jane Voorhees Zimmerli Art Museum, université Rutgers, Etats-Unis

Pause précision :
Théophile-Alexandre Steinlen (1859-1923) fut peintre, graveur, illustrateur, affichiste et sculpteur (rien que ça !). Habitué du cabaret parisien Le Chat Noir, on lui doit notamment la plus célèbre affiche (ci-contre) de ce lieu qui fut emblématique de la butte Montmartre à la fin du XIXe siècle.
L’artiste se passionne pour la rue et il la représente sans cesse avec, pour principaux sujets, les plus déshérités qui l’habitent ou l’arpentent et tous les petits métiers qui la font vivre et s’animer sans nécessairement payer de mine. Mais Steinlen est aussi (et surtout) connu comme le spécialiste des chats, qu’il peint, dessine et sculpte même (voir ci-dessous).

Steinlen dans son atelier,  Photographie de l'agence de presse Meurisse (1913),  Bibliothèque nationale de France.
Steinlen dans son atelier,
Photographie de l’agence de presse Meurisse (1913),
Bibliothèque nationale de France.

En effet, tous les chats de la fameuse butte parisienne semblent s’être réunis afin d’élire leur chef suprême. Il faut savoir que le mot « apothéose » marquait l’admission d’un mortel parmi les dieux en Grèce et en Rome antiques. Or, en sauvant un chat au début du film (et pas n’importe lequel), la jeune Haru a droit, elle aussi, à son apothéose : c’est ainsi que, la nuit venue, une procession de chats (avec, parmi eux, leur roi) vient chez elle pour la remercier et la couvrir de cadeaux. Malheureusement, tout cela va lui apporter plus d’ennuis qu’autre chose !

L'Apothéose des Chats à Montmartre Théophile-Alexandre Steinlen - 1905 Musée de Montmartre (Cette toile monumentale se trouvait initialement au Chat Noir, ancien célèbre cabaret parisien.)
L’Apothéose des Chats à Montmartre
Théophile-Alexandre Steinlen – 1885
Huile sur toile, 164,5 x 300 cm
Musée de Montmartre
(Cette toile monumentale se trouvait initialement au Chat Noir, ancien célèbre cabaret parisien.)
La procession des chats déambule dans la ville jusqu'à la maison de la jeune Haru.
La procession des chats déambule dans la ville jusqu’à la maison de la jeune Haru.
La procession des chats déambule dans la ville jusqu'à la maison de la jeune Haru.
La procession des chats déambule dans la ville jusqu’à la maison de la jeune Haru.

Soyons clairs, toutefois : Le Royaume des chats peut sembler moins ambitieux que la plupart des films d’animation du studio Ghibli. Certains diront qu’il est même raté. Je ne suis pas d’accord. Je le vois davantage comme un Disney : divertissant avant tout, bien que non dénué de sens (ni de scènes violentes, que le réalisateur a choisi de faire passer grâce à l’humour omniprésent dans le film). Il est également moins fouillé visuellement que les autres films du studio. Mais le budget qui lui fut alloué, durant sa réalisation, était aussi plus maigre : Le Royaume des chats devait, à l’origine, être un court métrage destiné uniquement au format DVD. Les mauvaises langues diront qu’il aurait dû le rester. Mais, en ce qui me concerne, j’ai apprécié ce bol d’air frais au milieu du sérieux parfois un peu trop pesant et prôné par les films Ghibli (que j’apprécie aussi, là n’est pas la question, mais j’aime aussi regarder des films d’animation japonais sans finir en larmes ou subir une dépression de sept jours après visionnage). Faire simple, ça n’est pas forcément faire mal. De même que divertissant ne rime pas toujours avec dépourvu de sens ou d’intérêt (la preuve, ça ne rime pas en fait !…).

En écrivant son roman, Shizuku s'imagine en train de vivre toutes sortes d'aventures aux côtés du Baron dans un monde onirique. (Si tu tends l'oreille, 1990)
En écrivant son roman, Shizuku s’imagine en train de vivre toutes sortes d’aventures aux côtés du Baron dans un monde onirique. (Si tu tends l’oreille, 1990)

Si tu tends l’oreille, lui, est un petit bijou mais le public qu’il vise n’est pas nécessairement le même : plus contemplatif, il plaira davantage à un public capable de comprendre toutes ses subtilités. Pourtant, je trouve que les deux films se complètent bien, à leur façon. En ce qui me concerne, je les ai aimés tous les deux pour différentes raisons.

Pause précision : Si tu tends l’oreille fut réalisé par Yoshifumi Kondo qui, à l’époque, était pressenti pour succéder au maître incontesté des Studios Ghibli : Hayao Miyazaki. Malheureusement, Si tu tends l’oreille fut son unique film car il mourut trois ans plus tard d’une rupture d’anévrisme. La même année, Hayao Miyazaki décida même de prendre sa retraite… Mais il revint finalement pour réaliser Le Voyage de Chihiro (2001).
Toutefois, lors de la réalisation du Royaume des Chats, il semble qu’Hayao Miyazaki demanda lui-même à ce que les personnages de Baron et de Muta soient réutilisés. Preuve que ces personnages lui tenaient à cœur et, probablement, constituaient un hommage au travail de son défunt collègue. C’est pourquoi il s’adressa au même auteur : Aoi Hīragi (déjà créateur du manga qui inspira Si tu tends l’oreille).
A la base, le film ne devait pas durer plus de vingt minutes car il s’agissait alors d’une commande passée par un parc de loisirs. Faute d’argent, le projet fut abandonné par le dit parc et le Studio Ghibli décida de transformer le film en moyen-métrage, de quarante-cinq minutes environ, qui ne sortirait qu’en DVD. Toutefois, en voyant la qualité du travail du réalisateur Hiroyuki Morita (qui, d’ailleurs, réalisait là son tout premier film et le dernier à ce jour), les producteurs décidèrent que le film (d’une durée d’une heure et quart, finalement) sortirait au cinéma.

Sources :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Si_tu_tends_l%27oreille
http://www.kanpai.fr/culture-japonaise/royaume-chats-analyse

Aperçu des décors fouillés et travaillés de Si tu tends l'oreilles (1990).
Aperçu des décors fouillés et travaillés de Si tu tends l’oreilles (1990).
Aperçu des décors fouillés et travaillés de Si tu tends l'oreilles (1990).
Aperçu des décors fouillés et travaillés de Si tu tends l’oreilles (1990).

Ces deux films racontent en tout cas de très touchantes histoires d’amour et bénéficient, en plus, de dessins magnifiques qui sauront, j’en suis sûre, vous transporter. Pour ma part, le Baron est depuis longtemps l’un de mes personnages de fiction favoris et ce sont ses histoires, quand j’ai un coup de mou ou une baisse de moral, qui me donnent envie de me remettre à créer. Ce qui tombe plutôt bien puisque Si tu tends l’oreille raconte finalement l’histoire de deux jeunes gens qui se démènent pour réaliser leurs rêves et leurs arts. Et avec Le Royaume des Chats, il forme un duo de films célébrant joliment les bienfaits de l’imagination et de l’imaginaire pour qui les nourrit avec passion.

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Le Baron sortant de sa maison pour se présenter à Haru. (Le Royaume des Chats, 2002)

* Site web de Andrew Michael Golden : http://andrewmichaelgolden.com/
* Article dédié aux chats noirs dans la peinture : http://echos-de-mon-grenier.blogspot.fr/2013/10/lapotheose-des-chats-noirs.html
* Analyse de Si tu tends l’oreille : http://www.kanpai.fr/culture-japonaise/si-tu-tends-loreille-analyse


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